" Aimé Richardt a, longuement et minutieusement, situé la médecine du Grand Siècle, par rapport à ses devancières, remontant au-delà d'Hippocrate et Galien, pour expliquer le raisonnement médical demeuré identique, pendant les dix siècles qui ont précédé le règne de Louis XlV. Jusqu'à ce dernier, et compte tenu du respect entourant les anciens, la méthode déductive était restée ancrée dans les mentalités, malgré des anatomistes, chirurgiens ou médecins originaux, tels Ambroise Paré ou Paracelse.
Appuyé sur cette mise en perspective historique, l'auteur fait une description exhaustive de l'exercice de la médecine et de ses auxiliaires (les apothicaires, les barbiers-chirurgiens...). Il dresse le portrait de quelques figures emblématiques de praticiens de la cour, de la ville ou de l'université, et analyse l'organisation sanitaire et universitaire. Il n'oublie pas de faire de fréquentes et judicieuses références à Molière, qui n'a exagéré ni la faiblesse du raisonnement médical de l'époque, ni la cupidité des hommes, ou le caractère théâtral et malsain de leur comportement déontologique.
Cependant, Aimé Richardt, passionné par "son" siècle, mais aussi conscient des limites de la chimie de l'époque, en vient presqu'à défendre le corps médical et les galénistes, contre l'auteur du "Malade imaginaire"...
Sa thèse est, qu'au-delà d'apparences cliniques trés péjoratives, ce qui caractérise le XVIIe siècle, c'est un tournant médical décisif : primauté des faits sur le raisonnement théorique, promotion du français imposant la transparence du raisonnement médical, invention du microscope, découverte de la circulation et de la thérapeutique chimique...
Quelques pages denses permettent à l'auteur de fonder son affirmation de la primauté du Grand Siècle, d'autant que Louis XlV, privilégiant l'enseignement de Dionis, par rapport à celui de la Faculté de médecine de Paris, s'avérait, comme dans le domaine des Arts, un souverain au jugement très sûr.
La démonstration d'Aimé Richardt peut paraître vulnérable, si on se borne à mettre en parallèle la réalité praticienne médiocre et le haut niveau scientifique du XVIIe siècle.
Mais c'est Aimé Richardt, qui a, en grande partie, raison. En effet, les innovations scientifiques sans conséquence tangible sur la vie quotidienne du grand public, bien qu'elles fassent partie du "capital" du siècle, sont lentes à être acceptées. Les idées du XVIIe siècle, effectivement très novatrices, ont préparé la médecine praticienne... du XVIIIe."
Philippe VICHARD, membre de l'Académie nationale de médecine.